Sur la toile comme sur le petit écran, le journaliste francophile Alexander Seale fait sonner l’actualité britannique aux oreilles des francophones. Un destin londonien qui va jusqu’à sceller aussi le sort du nouveau café de l’institut français.
🔴En direct de l'inauguration du nouveau café de l' Institut Français du Royaume-Uni : le café Tangerine
Publiée par Londres Mag sur Mercredi 30 octobre 2019
Qu’est ce que représente pour vous l’inauguration du café ?
Le Café Tangerine représente les liens franco-britanniques. Il y a la notion « with a French touch and a British twist. » J’ai connu d’autres cafés à l’institut un peu différents. Je me rappelle en 2016 lors de la coupe d’euro de foot quand la France était en finale la brasserie a retransmis tous les matchs des Bleus. C’était sympa et ça rassemblait la communauté française à Londres et l’Institut français doit être là pour cela. J’étais déçu par Aubaine. Il y a une autre Aubaine à South Kensington et ça ne rassemblait pas les Frenchies ici dans la capitale britannique. J’espère que ce nouveau café, le Café Tangerine va fonctionner. Les serveurs sont francophones et ont été au Lycée Français.
Quelle est votre relation avec les gérants du nouveau café ?
Les gérants Limpet et David sont des amis de la famille. Une amie de ma mère, Susan Lobel a emmené ma mère il y a quelques années au Chelsea Physic Garden. C’est un beau jardin à Chelsea avec un café. À l’époque Limpet Barron et son compagnon David Hughes géraient le café et avaient des clients réguliers dont Susan et ma mère et j’allais souvent le dimanche manger la bas. On dégustait un très bon saumon en croûte, une délicieuse quiche au fromage et en dessert un gâteau à la polenta. Ils sont devenus des connaissances en fait.
🍊 Bon appétit! 🍊
The #CaféTangerine @ifru_london is officially open!
From coffee to wine, cakes to snacks, come by to enjoy delicious dishes & quiches of all kinds 🍽️ 🍷
From 11am to 9pm (5pm – 9pm on Mondays)
More info👉https://t.co/LefksaSVa6 pic.twitter.com/BzNJ5w6yps
— Institut français UK (@ifru_london) October 31, 2019
Votre nom a été cité dans le discours de remerciements des gérants du café Tangerine. Pourquoi ?
Quand le Chelsea Physic Garden a changé de propriétaire, Limpet et David ont été licenciés du jardin. Beaucoup de clients qui avaient l’habitude d’aller au Tangerine Dream Café se sont plaints dont ma mère. Limpet et David cherchaient à tout prix du travail. Ils faisaient du catering pour des particuliers mais cela ne suffisait pas. À cette époque, en décembre 2018, j’ai vu qu’Aubaine de l’institut français fermait ses portes et, quelques mois plus tard, que l’institut cherchait un gérant pour son café. J’ai donc parlé à Limpet qui m’a d’abord dit qu’elle voulait un jardin à l’extérieur mais le quartier lui convenait car des clients du Chelsea Physic Garden pouvaient venir à l’institut français. Ce que j’ai fait? J’ai écrit à Stéphane Harzelec, directeur adjoint de l’institut, et je lui ai passé le numéro de Limpet. Je lui ai envoyé un morceau du délicieux gâteau à la polenta. Il est sublime ! J’invite d’ailleurs vos lecteurs à goûter ! A partir d’avril 2019 Stéphane a échangé par mails avec Limpet et à David. J’ai accompagné Limpet et David à l’Institut français en juin pour traduire cet échange. Ils ont eu un entretien physique avec trois personnes de l’institut. Cela a pris six mois à tout régler car il devait y avoir validation de Paris avant de signer le contrat en octobre 2019. Ils étaient heureux et moi aussi ! Pour moi, je les ai aidés et j’ai aidé l’institut français que j’adore ! C’est un endroit formidable.
Avec cette histoire et votre carrière de Freelance auprès des médias francophones, vous sentez-vous ambassadeur de la culture française à Londres ?
Je ne sais pas si je me sens comme étant un ambassadeur de la culture française à Londres mais en ces temps d’incertitudes avec le Brexit, je pense que la culture française doit avoir une place importante à Londres et au Royaume-Uni. En 2011 quand j’ai passé un oral de journalisme, l’examinateur m’a dit que je devrais être diplomate. Mon grand père était ambassadeur de la Syrie dans les années 60 jusqu’en 1982. Avant cela il a créé la télé et radio syriennes quand le pays a été une démocratie. Je suis Britannique, né à Londres, j’ai fréquenté le Lycée Français et j’ai passé 11 ans à Paris. Je suis à Londres depuis 2012. Je travaille en tant que journaliste pour des médias francophones. J’essaie de parler de l’actu française et de la culture aussi à part le Brexit et les News au UK. Mais j’espère en tant que britannique être un pont entre les anglais et les Français à Londres. Je me suis fait des contacts voire des amis dans cette belle communauté et le Royaume-Uni très divisé en ce moment. J’ai voté « Remain » au référendum et je vois qu’actuellement ça tourne quand même en rond, nous sommes dans une impasse. C’est intéressant de voir qu’on a voté aux élections européennes quand même. J’ai voté pour « Change UK » qui espère avoir un second référendum et que le Brexit soit révoqué, ce serait mauvais pour l’économie britannique et pour la santé aussi.
Vous travaillez avec des médias francophones, quel est l’intérêt pour ces médias de traiter de l’actualité britannique ?
D’abord, j’imagine qu’il y a beaucoup de Britanniques dans ces pays qui s’y intéressent. Mais aussi en ce moment avec le Brexit, ça intéresse beaucoup la communauté européenne et francophone et pour avoir une autre perspective. En tant que journaliste, je me base pas mal sur des sources britanniques (journalistes et députés) puis après j’écris mon script.
Plus d’un million de personnes dans les rues de #Londres aujourd’hui. Il y avait des jeunes qui n’étaient pas en âge de voter au référendum en 2016 et qui le peuvent maintenant. Il y avait beaucoup de familles et de citoyens européens. Un second référendum est possible. #Brexit pic.twitter.com/QXs62jYlvv
— Alexander Seale (@AlexSeale) October 19, 2019
Est-ce qu’il existe une forme de coopération entre les journalistes ?
Il pourrait y en avoir une. Je travaille depuis chez moi par exemple comme je suis en freelance, si j’ai un direct tôt vers 7h, je fais mon direct que je prépare la veille. Je le réalise devant chez moi. Après je me repose un peu et si je dois préparer un autre direct à Westminster, ça veut dire que l’intervention tourne rapidement en boucle dans le journal. Et c’est à ce moment que je reconnais mes confrères. Je suis aussi membre de la Foreign Press Association, pour la presse étrangère depuis décembre 2018. Et donc ça m’a permis d’aller à des conférences de presse, de rencontrer des confrères que j’avais vus sur Twitter. Et donc c’est un bon moyen de tisser des liens et donc de s’ouvrir des portes.
Qu’est ce qui vous a amené à devenir correspondant ?
Le journalisme radio, j’ai fait des stages à Paris, je suis revenu à Londres en 2013, je cherchais du travail et j’ai œuvré à BBC Afrique, c’est le service francophone de la BBC avec un bureau à Dakar et un bureau à Londres, je travaillais là-bas à Oxford Circus quand le web était là. J’écrivais 5 ou 6 articles pour le web. C’était intense. J’ai d’abord été embauché comme stagiaire pendant 15 jours. Et puis après, on m’a demandé de revenir en tant que freelance et on m’a appelé régulièrement. A cette époque, il y avait un conflit au Burkina-Faso, c’était en 2014 et après il n’y avait que la télé à Londres. J’ai gardé des liens avec eux, j’interviens parfois pour le Brexit. Mais après les attentats de Londres, et l’incendie de la Grenfell Tower, que ma carrière a changé puisque j’ai été contacté par la radio et télé canadiennes et après d’autres chaînes et médias m’ont sollicité. C’est très important d’être sur les réseaux sociaux. Ça m’a beaucoup aidé pour passer de travailler en rédaction de devenir correspondant et faire de direct télé. J’ai aussi mon matériel. Donc ça se fait naturellement.
Est-ce que vous avez des modèles, des gens qui vous ont inspiré ?
Oui, il y a l’ancien correspondant de BFM TV, mais il n’y officie plus, il est le journaliste sportif de BBC Afrique. Il s’appelle Emmanuel Coste et ce qui m’impressionne c’est qu’il n’a pas de fiches et écrit ses notes à la main. Avant tout, je tapais tout sur l’ordinateur et quand j’écris moi-même à la main, je me suis rendu compte que je les mémorisais ? J’aime bien Arnaud Comte, correspondant de France 2 et aussi le correspondant de la RTS, la télé suisse, et qui est parti de Londres récemment qui s’appelle Laurent Burkhalter.
Comment se passe un duplex ?
Cela dépend déjà du temps d’antenne, parfois 1min30, parfois 2 minutes. Déjà c’est assez court, devoir résumer les enjeux liés au Brexit, est assez complexe, il faut bien résumer et synthétiser. Mais ça dépend aussi de si je suis en direct ou pas. En direct, on peut avoir quelques aléas, par exemple une fois j’entendais ma voix dans l’oreillette, ce qui n’est pas très normal. Et puis parfois il y a des « faux directs », c’est-à-dire que je m’enregistre en parlant d’un sujet, je leur envoie et ils le font tourner en boucle dans leurs JT. Aussi, je fais tout avec mon téléphone donc je dois me concentrer sur la partie technique, veiller à ce que tout fonctionne correctement mais également sur mon script. Une seule fois, j’ai eu la chance d’avoir un caméraman lorsque j’ai remplacé une consœur de la RTBF à Londres, cela a allégé mes épaules ! Avec le téléphone, je dois brancher mon micro, installer le trépied, aller sur les applications des rédactions. C’est compliqué au début mais après ça vient naturellement.
Pour finir, vous préférez être décapité par un frisbee ou vous réincarner en olive ?
Je crois réincarné en olive mais je crois que Boris Johnson préfère être décapité par un frisbee.
Entretien par S.L. et Alexandre Mondragon