L’industrie alimentaire britannique se voit confronter à de graves perturbations dans la majorité de ses secteurs à l’approche d’un Brexit sans accord.
Le marché anglais face à la concurrence
Face aux concurrents européens, l’industrie alimentaire se trouve dans une situation plus que déloyale. La Fédération de l’alimentation et des boissons a demandé expressément aux ministres britanniques de clarifier le scénario. Elle attend toujours une réponse concrète. Le mieux pour eux serait que toutes les lois sur la concurrence soient suspendues avant de trouver une solution plus crédible, pour permettre aux différentes firmes de collaborer ensemble. Si cela n’est pas fait, dans le cas d’un no deal, il faudra faire face à des pénuries sélectives pendant peut être plusieurs mois. Les différentes entreprises essayent d’agrandir au maximum leurs espaces de stockage pour pallier ce problème durant un temps. Mais l’ancien président de Nothern Foods, un fabriquant de produits alimentaires, Lord Haskins, s’inquiète « Je pense qu’il y aura une certaine panique d’achat qui créera des pénuries. Je suis très inquiet de la priorité accordée aux supermarchés, nous devons nous rappeler que les écoles sont très importantes, le NHS est très important… Les restaurants et la restauration. Tous ont des systèmes de distribution très complexes. Je ne vois pas comment on pourrait laisser le secteur privé s’en charger franchement. »
Le porte-parole du Royaume-Uni cherche à rassurer en rappelant que la moitié de la nourriture consommée provient directement de leurs terres et que la pénurie générale ne sera donc pas possible, un discours peu convaincant quand il est démontré que plus de 30% des produits sont importés de l’Union européenne.
La réelle solution pour les Britanniques pour ne pas souffrir de ces pénuries et de se priver de certains produits serait de développer eux-même sur leurs terres de nouvelles cultures ou de trouver un soutien puissant pouvant pallier leurs manques. Le soutien de Donald Trump au nouveau premier ministre pourrait présager du pire.
L’agriculture de l’Irlande déjà menacée
En Irlande, le secteur agricole et agroalimentaire représente l’économie principale du pays. L’agriculture est largement dominée par l’élevage et la production laitière sur une période de plus de 300 jours par an. La majorité des pâturages sont utilisés à cet effet. Sur cette production, 90% sont destinés à l’exportation dont 37% vers le Royaume-Uni et le reste vers l’Union européenne.
Seulement, à l’approche du Brexit, la tension monte pour l’Irlande du Nord qui se voit obligé, d’abattre plus de 45 000 vaches laitières si de nouveaux tarifs, plus élevés venaient à être établis. En effet, si l’exportation vers l’Union européenne n’est pas protégée par des prix avantageux alors les agriculteurs ne pourront plus subvenir à leurs dépensess. Les droits de douanes augmentant, le prix du lait lui aussi atteindrait des sommets. Face à une surabondance de lait et peu d’acheteurs sur le marché, le lait se perdra et les paysans n’auront d’autre choix que de se séparer d’une partie importante de leur bétail. La seule solution viable serait que le gouvernement accepte de mettre en place un droit de douane de 0%, avec ses voisins européens. Une position que l’Etat actuel ne semble pas enclin à prendre.
L’agroalimentaire et la grande distribution en rupture de stock ?
Une crainte grandissante pour les espaces de distribution se fait aussi ressentir.
L’un des hauts responsables de la Food Drink Federation anglaise qui représente plus de 7000 entreprises au Royaume-Uni a annoncé ce mercredi 7 août qu’il craignait très fortement la sortie sans accord que Boris Johnson s’évertue à maintenir. Cela provoquerait de graves perturbations, pas forcément visibles à court terme grâce aux stocks effectués en prévision, mais catastrophique sur du long terme. L’interrogé va plus loin en déclarant de possibles pénuries de produits, principalement au niveau des aliments frais qui n’ont pas pu être stockés en raison de leur dégradation rapide. Le Royaume-Uni pourrait donc se voir contraint de faire un trait sur certaines denrées.
Une augmentation des contrôles et inspections
L’Union européenne a fait savoir à ses voisins britanniques que, si ceux-ci maintenaient leur « no deal », elle se verrait dans l’obligation de renforcer et mettre en place des contrôles douaniers et des inspections de sécurité alimentaire.
Il n’y a plus qu’à attendre de voir si Boris Johnson s’ouvre davantage et décide de renouer avec l’Union européenne avec un deal avantageux des deux côtés.
Emma Lachevre