Tous devant vos écrans ce soir à 21 heures sur Channel 4 ! C’est l’heure du film très controversé Brexit, the Uncivil War, en partie financé par la chaîne de télévision américaine HBO. Benedict Cumberbatch interprètera le rôle de Dominic Cumming, directeur de campagne de Vote Leave.
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À une semaine d’un vote fondamental pour le Brexit
Le timing est ce qui surprend le plus. Brexit, The Uncivil War de James Graham raconte comment le leave a remporté le referendum de 2016 grâce à la récolte des données personnelles sur les réseaux sociaux. Il sera diffusé ce soir sur la chaîne britannique Channel 4… à une semaine du vote du Parlement sur l’accord de retrait formulé entre Theresa May et l’Union européenne. Un moment idéal pourtant pour le scénariste : « Je crois que l’art, le théâtre et le récit ont autant un rôle civique qu’ils divertissent », a-t-il soutenu lors de l’avant-première du téléfilm, jeudi 3 janvier (« I believe that art, drama, and story-telling has a civic purpose as well as being entertainment ».) Et d’ajouter : « Cela peut nous aider à comprendre ce qui se passe en ce moment d’une manière différente que les médias ». (It can contribute to our understanding of what’s happening at the moment in a different way…than journalism or social media).
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« Tout le monde sait qui a gagné. Mais personne ne sait comment. »
« Everyone knows who won. But not everyone knows how » : cette citation extraite de la bande-annonce illustre la volonté de James Graham de s’attaquer au sujet controversé de la manipulation électorale. Les stratégies de la campagne de Vote Leave sont explorées dans le film qui expose un combat politique sur les réseaux sociaux. Le groupe de campagne aurait exploité les données personnelles de millions d’Anglais, notamment ceux qui étaient peu politisés, pour les inciter à voter pour le yes. Des centaines de publicités ciblées ont, entre autres, été mises en place. Bien que l’exploitation des données et des réseaux sociaux ait nécessairement joué un rôle important, certains commentateurs politiques ont affirmé que l’électorat n’était pas influençable à souhait. James Graham a déclaré ne pas vouloir juger cette stratégie électorale, mais n’a pas minimisé l’importance de la technologie et des données dans les combats politiques.
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Une volonté de donner du sens à un drame
Le 16 juin 2016, quelques jours avant le referendum sur le Brexit, Jo Cox, députée travailliste, est assassinée par un homme à l’extérieur d’une bibliothèque. L’affaire choque le pays, James Graham décide d’écrire un film pour raconter les enjeux politiques du Brexit. « Quand nous pensons à la campagne référendaire, nous pensons aux personnages publics de Boris Johnson ou de David Cameron, mais je pense que le plus intéressant, c’est de passer le rideau et d’interroger les stratégies, les gens qui ont diffusé des messages et comment une campagne fonctionne au XXIe siècle », confie-t-il au New European, média britannique pro-européen. (When we think about the referendum campaign we think about the very public figures of Boris Johnson or David Cameron, but I think what’s more interesting is to get behind the curtain and interrogate the strategies and the people who came up with ideas and messages and how a campaign works in the 21st century.)
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Une campagne dans l’illégalité ?
La Commission électorale a inculpé le 17 juillet 2018 le groupe de campagne Vote Leave. Des membres du gouvernement May comme Boris Johnson ont été concernés par l’affaire. Vote Leave aurait versé £625 000 à Be Leave qui utilisait les mêmes données personnelles. Cette manœuvre aurait été réalisée afin de ne pas dépasser le plafond de campagne légal. Alors que Dominic Cummings a rejeté ces accusations, la Commission électorale a infligé une amende de £61 000 à Vote Leave pour ne pas avoir déclaré qu’elle travaillait en collusion avec Be Leave et pour avoir dépassé le plafond de dépense.
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Les brexiters en force
Les députés Boris Johnson, Michael Gove, l’homme d’affaires et co-fondateur de la campagne Leave.UE Arron Banks ou encore Matthew Elliott, chef exécutif de la campagne Vote Leave… font partie des nombreuses personnalités représentées dans ce film qui se veut au plus proche de la réalité. Le personnage principal, Dominic Cumming, directeur du Vote Leave, est interprété par Benedict Cumberbatch. Ferme, impulsif, prêt à tout pour atteindre ses objectifs. Dans la bande-annonce, il crie d’ailleurs de joie le fameux slogan des brexiters « Let’s take back control ! » (Reprenons le contrôle !) devant un bus de campagne. « Il a su retranscrire sa passion, sa concentration, son dévouement et sa frustration avec les membres du parlement », (« He captures his passion, his focus, his dedication, his frustration with members of parliament. ») observe Matthew Elliot dans les colonnes du Guardian au sujet de l’acteur Benedict Cumberbatch.
En plus de ce film, un nouveau genre littéraire commence à faire parler de lui : il s’agit du Brex-Lit (jeu de mot entre littérature et Brexit, ndlr). Ce sont donc des œuvres d’auteurs britanniques comme Ali Smith, Jonathan Coe où James Silvester qui sont marquées par l’évènement historique.
Émilie Moulin et Thalia Creac’h