Vous ne connaissez pas encore cette jeune fille attachante à la folie carrément comique ? Pas de panique, Londres Mag vous la présente ! De YouTube aux planches londoniennes, Marie S’infiltre manie l’art de l’usurpation à merveille. Zoom sur une comédienne en pleine ascension, décalée et irrévérencieuse, qui s’exfiltre de Paris pour une soirée !
Marie, on vous connaît avant tout par vos vidéos sur YouTube. Est-ce que vous vous considérez YouTubeuse ?
Certainement pas, quelle horreur! Non, je ne suis pas YouTubeuse. Mon métier, c’est comédienne. YouTube, ce n’est qu’un média, un super média. Ma profession, ce n’est pas de faire des vidéos sur YouTube, dont je ne respecte d’ailleurs pas trop les standards… Mais cela m’apporte une très grande visibilité. Mon spectacle fait déjà salle comble toutes les semaines grâce à ça.
Qu’est-ce que cela veut dire, pour vous, être comédienne?
Je ne conçois pas mon métier de comédienne d’une manière classique. J’ai vraiment envie d’être autonome, de réaliser mes propres films et pièces de théâtre. C’est en cela que mon spectacle me convient bien parce que j’ai tout fait, de l’écriture à la mise en scène. C’est vraiment gratifiant.
Etre sur scène, c’est un rêve que vous avez depuis toujours?
Au départ, je voulais faire de la politique. Après khâgne et hypokhâgne, j’ai suivi une licence de philo et de droit. Puis, j’ai rejoint les bancs de Sciences Po et, alors que je préparais le concours d’entrée à l’ENA (Ecole Nationale d’Administration), je m’inscris, complètement par hasard, au cours Florent pour un cours du soir. Et c’est à ce moment-là que je me dis: oh my God! je suis comédienne! Ce fut la révélation.
Comment êtes-vous passée du Cours Florent à YouTube?
Le Cours Florent a duré un an et demi, pendant lequel je me suis consacrée au théâtre classique : XVIIe-XVIIIe siècles, Molière, tragédies, Racine… j’adore. En même temps, je commence à comprendre que le métier de comédienne c’est très dur. Je me dis qu’il va falloir que je me débrouille pour avoir une stabilité rapidement. C’est alors que je lance ma première vidéo sur YouTube et que j’en fais un concept.
Parlez-nous de cette première vidéo…
Il s’agissait de faire un focus sur un camp de migrants dans le 16e arrondissement et de recueillir les réactions du voisinage. Dans le même temps, il y avait aussi une grande manifestation à Dauphine. C’était la folie, des fachos dans tous les sens… Quand j’ai posté cette vidéo sur YouTube, il y avait à peine 1 000 vues, ce n’est rien mais elle était de bonne qualité. Alors, j’ai décidé d’en faire plusieurs, d’aller un peu partout et de développer un concept autour du pseudonyme « Marie S’infiltre ».
Quel est votre secret, pour vous infiltrer, interpeller les gens, les faire parler comme vous le faites?
Pour commencer, je fais une enquête préalable pour déterminer le sujet que je vais traiter. Il faut que ce sujet pose problème dans la société, qu’il fasse appel à l’émotionnel des gens et qu’il comporte quelque chose de particulièrement ridicule que l’on va pouvoir utiliser pour en faire une belle satire. Dans mon spectacle, je défends l’idée que le mensonge, tellement condamné dans notre société, constitue au contraire l’arme la plus habile, la plus féroce, pour atteindre le pouvoir, briller et réussir. Dans mes vidéos, ce mensonge est mis en scène, à travers les jeux de rôles que j’instaure. J’entre dans la peau d’un personnage qui va permettre aux gens de s’exprimer librement, pour aider les gens à s’exprimer plus librement. Souvent je leur dis que je suis comme eux pour délier les langues plus facilement. J’énonce des horreurs pour leur faire prononcer des horreurs aussi. Par contre, à aucun moment, je ne veux condamner ou moraliser. L’objectif n’est pas de montrer ce qu’il y a de bien ou de mal, mais de faire naître de cette ambivalence un ressort collectif.
Coup de cœur de la rédaction, sa vidéo «Touche pas à mon porc». À une heure et demi de Paris, Marie S’infiltre dans un élevage de cochons. En pointant du doigt certaines bêtes, elle ironise : « ça c’est mon petit Strauss- Kahn, là c’est mon Weinstein. » On ne vous en dit pas plus…
Vous présentez votre spectacle à Londres le 24 mars prochain. Est-ce qu’on l’on peut parler d’un one-woman show?
Je déteste le mot one-woman show ! Mais oui ç’en est un. Je joue différents personnages d’un même récit, notamment mon metteur en scène, personnage fondateur du spectacle. Il y a évidemment des interactions avec le public, mais je ne fais pas d’improvisation. J’ai construit une histoire avec un début et une n… Par contre, toutes les personnes qui sont venues me voir m’ont dit : « Je ne savais pas du tout à quoi m’attendre, mais certainement pas à ça ! » Ce que je livre est très surprenant je crois, aussi parce que c’est très différent des vidéos.
Entretien réalisé par Cypriane El-Chami
PRATIQUE
Le spectacle aura lieu samedi 24 mars, à 20h45 au JW3, 341-351 Finchley Road, NW3 6ET (Station Finchley Road)
Retrouvez la billetterie en ligne sur le site www.jw3.org.uk